Polistes fuscatus (Fabricius 1793)
Par Émile BRISSON et Sandra HERNANDEZ
Édité par Étienne Normandin
Texte et photographies ©2015 CC BY-SA 4.0, les auteurs
Polistes fuscatus vue de profil
Polistes fuscatus vue de haut
Spécimen capturé le 3 septembre 2015 à la Station de Biologie des Laurentides, Saint-Hippolyte, Québec, Canada.
Règne : Animalia
Phylum: Arthropoda
Classe: Insecta
Ordre: Hymenoptera
Famille: Vespidae
Genre: Polistes
Espèce: fuscatus
Polistes fuscatus est une guêpe de la famille des vespidés, qui fait partie de l’ordre des hyménoptères (sous-ordre Apocrita)1. L’espèce a été découverte et nommée pour la première fois en 1793 par Joan Christian Fabricius2, un entomologiste danois3.
La famille des vespidés comprend les guêpes sociales et compte en tout un peu moins de 1000 espèces4. Les colonies formées par les espèces de cette famille sont dites annuelles, c’est-à-dire qu’elles se renouvellent chaque année avec des individus différents5.
Identification
Alors que le gastre (abdomen) est l’indice qui nous amène à l’ordre des hyménoptères 6, les longues pattes et le corps allongé et mince peuvent nous permettre de classer notre spécimen dans le genre Polistes7. Les antennomères apicales noires confirment que nous sommes en présence de Polistes fuscatus. Notez cependant que la femelle ne possède pas cette caractéristique, ce qui implique que nous sommes face à un individu mâle. La femelle aurait pu toutefois être identifiée par son corps foncé, surtout pour les sous-espèces présentes au Canada8.
Que l’individu soit mâle ou femelle, on peut aisément différencier l’espèce de sa célèbre compétitrice introduite (origine européenne), Polistes dominula, par le fait que celle-ci possède des antennes majoritairement orange9 . Bien que Polistes dominula, soit de façon générale plus petite que Polistes fuscatus, notre spécimen mesure 20mm, une taille similaire à Polistes dominula 10.
Ci-dessus: Polistes dominula sous trois angles. Spécimen provenant de Montréal.
Biologie de l’espèce
Polistes fuscatus est une espèce de guêpe à papier indigène de l’Amérique du Nord11. Son aire de répartition s’étend du Pacifique à l’Atlantique et du Canada tempéré à l’état de Virginie aux États-Unis12. Les adultes se nourrissent principalement de nectar et nourrissent leurs larves avec des petits insectes, comme des chenilles12. Étant une espèce eusociale, des colonies sont fondées par les individus reproducteurs, qui produisent des individus ouvriers11.Elles sont capables de reconnaître les membres de leur propre colonie grâce aux marqueurs faciaux et abdominaux18.
L’eusocialité de P. fuscatus est plutôt simple, car elle ne produit pas de castes d’individus spécialisés dans la défense de la colonie12. Ce sont donc les ouvrières et la reine elle-même qui défendent la colonie en cas d’attaque19. En début de saison, lorsque la colonie commence, c’est la reine qui démontre le plus d’agressivité, puisque son investissement est plus important que celui des ouvrières. En fin de saison, au contraire, l’investissement des ouvrières est plus grand que celui de la reine, elles démontrent donc plus d’agressivité19.
Une autre espèce de guêpe à papier, Polistes dominula, a été introduite d’Europe, probablement à plusieurs reprises13. Elle a colonisé l’Amérique du Nord, réduisant ainsi la présence de P. fuscatus, puisqu’elles occupent la même niche écologique13, 14. Le succès de P. dominula peut être expliqué par plusieurs facteurs, malgré le fait que cette espèce arrivait dans un nouvel environnement.
Premièrement, P. dominula a un cycle de développement plus court que P. fuscatus, ce qui lui permet d’établir une colonie plus rapidement et d’avoir accès aux ressources plus rapidement13, 15. Ensuite, P. dominula a une diète plus généraliste que P. fuscatus13. Ces deux facteurs combinés font en sorte que P. dominula possède des colonies beaucoup plus productrices que P. fuscatus14, 15, ce qui avantage la survie de l’espèce.
De plus, Gamboa et al (2002) rapportent qu’aucune intrusion dans les colonies des deux espèces n’a été observée, ce qui laisse croire que la compétition entre ces espèces de guêpes est indirecte et s’effectue ainsi par l’exploitation des ressources14.
Le seul avantage évolutif que possède P. fuscatus sur P. dominula est sa taille, qui lui permet de supporter des températures plus froides13. Il serait donc logique que P. fuscatus soit plus présente que sa compétitrice dans des régions un peu plus au nord et dans des endroits plus éloignés de la chaleur urbaine.
P. fuscatus et l’Homme
L’impact de P. fuscatus sur l’Homme peut être autant positif que négatif. Étant carnivore, elles peuvent capturer un bon nombre d’insectes, eux-mêmes nuisibles16. Toutefois, il arrive que l’espèce puisse être considérée comme une nuisance. En effet, en automne et en début hiver, des agrégats denses peuvent se former et causer des problèmes si ceux-ci sont situés proches des installations humaines17. Dans ces situations, des pièges attractifs peuvent être utilisés pour contrôler le nombre de guêpes. Parmi ces substances, le vinaigre de vin est particulièrement efficace16.
Références
1 – Myers, P., R. Espinosa, C. S. Parr, T. Jones, G. S. Hammond, T. A. Dewey. (2015). Polistes fuscatus. Repéré à http://animaldiversity.org/accounts/Polistes_fuscatus/classification/#Polistes_fuscatus
2- Global Biodiversity Information Facility (2015). Polistes fuscatus (Fabricius, 1793). Repéré à http://www.gbif.org/species/1310556
3 – Les éditeurs d’Encyclopaedia Britannica (2015). Johann Christian Fabricius, Danish entomologist. Repéré à http://www.britannica.com/biography/Johann-Christian-Fabricius
4 – Blais, C. (2015). Guêpe. Repéré à http://www.universalis.fr/encyclopedie/guepe/#i_23219
5 – Pouvreau, A. (1990). Les Vespides et l’Homme. Repéré à http://www7.inra.fr/opie-insectes/pdf/i88pouvreau.pdf
6 – University of Washington (2005). Hymenoptera. Repéré à http://courses.washington.edu/insects/455Students/a2_handouts/pdf_files/12_HymenopHNDT.pdf
7 – Pest Animal Control (2007). Bay of Plenty Environmental Report, via «Polistes (s.d.) Dans Wikipédia, l’encyclopédie libre.
Repéré à https://en.wikipedia.org/wiki/Polistes#cite_note-6»
8 – Buck, M., A. Marshall, S., K.B. Cheung, D. (2008). Identification Atlas of the Vespidae (Hymenoptera, Aculeata) of the northeastern Nearctic region. Repéré à http://cjai.biologicalsurvey.ca/bmc_05/77p_fuscatus.html
9 – Diterlizzi, T. (2004). Species Polistes dominula – European Paper Wasp. Repéré à http://bugguide.net/node/view/5081
10 – Stout, E. (2013). Polistes dominula. Repéré à http://animaldiversity.org/accounts/Polistes_dominula/
11- Reeve, H. K. et Gamboa, G. J. (1983). Colony activity integration in primitively eusocial wasps: the role of the queen (Polistes fuscatus, Hymenoptera: Vespidae). Behavioral Ecology and Sociobiology, 13(1), 63-74.
12- Encyclopedia of Life. Polistes fuscatus. Repéré à http://eol.org/pages/240113/overview
13- Liebert, A. E., Gamboa, G. J., Stamp, N. E., Curtis, T. R., Monnet, K. M., Turillazzi, S. et Starks, P. T. (2006, January). Genetics, behavior and ecology of a paper wasp invasion: Polistes dominulus in North America. In Annales Zoologici Fennici (pp. 595-624). Finnish Zoological and Botanical Publishing Board.
14- Gamboa, G. J., Greig, E. I., et Thom, M. C. (2002). The comparative biology of two sympatric paper wasps, the native Polistes fuscatus and the invasive Polistes dominulus (Hymenoptera, Vespidae). Insectes Sociaux, 49(1), 45-49.
15 – Armstrong, T. R. et Stamp, N. E. (2003). Colony productivity and foundress behaviour of a native wasp versus an invasive social wasp. Ecological Entomology, 28(6), 635-644.
16 – Landolt, P. J., Cha, D. H., Werle, C. T., Adamczyk, J. J., Meagher, R. L., Gilbride, R. L., … & Sampson, B. J. (2014). Polistes spp.(Hymenoptera: Vespidae) orientation to wine and vinegar. Florida Entomologist, 97(4), 1620-1630.
17 – Reed, H. C., et Landolt, P. J. (1991). Swarming of paper wasp (Hymenoptera: Vespidae) sexuals at towers in Florida. Annals of the Entomological Society of America, 84(6), 628-635.
18 – Tibbetts, E. A. (2002). Visual signals of individual identity in the wasp Polistes fuscatus. Proceedings of the Royal Society of London B: Biological Sciences,269(1499), 1423-1428.
19 – Judd, T. M. (2000). Division of labour in colony defence against vertebrate predators by the social wasp Polistes fuscatus. Animal behaviour, 60(1), 55-61.