Calligrapha philadelphica (Linnaeus 1758)
Par Catherine ROCQUE et Victoria THELAMON
Texte et images ©2017 CC BY-SA 4.0, les auteurs
CLASSIFICATION
Ordre Coleoptera
Sous-ordre Polyphaga
Infra-ordre Cucujiformia
Super-Famille Chrysomeloidea
Famille Chrysomelidae
Sous-Famille Chrysomelinae
Tribu Chrysomelini
Sous-Tribu Doryphorina
Genre Calligrapha
Espèce Calligrapha philadelphica
INFORMATIONS SUR LA FAMILLE
Calligrapha philadelphica ou le Calligraphe ligné du cornouiller a été décrit par Linnaeus en 1758. Ce petit coléoptère fait partie de la grande famille des Chrysomelidae ou « Leaf beetles » qui compte plus de 35 000 espèces à travers le monde (Jolivet, 1988) et pourrait compter jusqu’à 60 000 espèces selon des estimations plus récentes (Reid, 1995) (Arnett, 2002). De ces nombreuses espèces, 14 sous-familles en sont les représentantes. Les chrysomèles sont herbivores et ont très souvent une plante hôte propre à l’espèce pour l’alimentation et la reproduction. Étant donné leurs modes d’alimentation phytophages, ils sont donc nuisibles pour les plantes dont ils se nourrissent. Les Chrysomelidae montrent une réduction ou perte totale de certaines structures en comparaison avec les autres familles. Par exemple, les structures buccales sont plus réduites car les premiers chrysomèles consommait du pollen, la transition de pollinivore (se nourrit de pollen) à phyllophage (se nourrit de feuilles) nécessite une complexité moindre (voir figure 2). Par ailleurs, plusieurs chrysomèles ont moins de veinures sur les ailes, l’hypothèse est que l’ancêtre aurait une taille beaucoup plus réduite (Reid, 1995).
IDENTIFICATION et MORPHOLOGIE
Le genre Calligrapha est facilement identifiable grâce aux motifs caractéristiques sur les élytres (Zurita et al., 2004). Le patron générale des motifs, la couleur des élytres et du pronotum sont différents selon l’espèce. Les espèces C. vivina, C. suturella, ou C. multipunctata ressemble beaucoup à C. philadelphica sauf pour quelques détails.
Calligrapha philadelphica a une petite taille de 7 à 9 millimètres. Ils ont un pronotum entièrement noir et des pattes dotées de deux griffes bien définies (Majka, s.d.)(Arnett, 2002). Cette espèce ne présente aucune différence entre les mâles et les femelles, c’est-à-dire qu’il n’y a aucun dimorphisme sexuel.
Bien sûr, si on trouve le spécimen sur sa plante hôte (ici le cornouiller), cela aide à l’identification de l’espèce. Cependant, nous avons trouvé notre spécimen dans une Sarracenia (plante carnivore) dans la tourbière du Lac Geai. Nous avons donc identifier notre espèce grâce à une clef d’identification des calligraphes de l’est du Canada (14 espèces sur 38 en Amérique du Nord) (Majka, s.d.).
Les motifs noirs des élytres varient aussi entre individus et entre localités, c’est-à-dire qu’il y a beaucoup de variation intra- et inter-populations. Quand nous avons voulu confirmer l’identification de notre spécimen, nous l’avons comparé aux spécimens de la collection Ouellet-Robert, dont les motifs étaient légèrement différents prouvant la grande variation génétique.
C’est surtout la taille et l’épaisseur des motifs qui varient beaucoup, le calus huméral est plus fin que ceux des spécimen de la collection (Zurita et al., 2004). De plus, si on regarde le calus huméral, il peut parfois être fusionné avec la lunule humérale (en forme de lune) (Brown, 1945). Sur notre spécimen, on retrouve les deux formes. En effet, ils sont fusionnés sur l’élytre gauche et séparé sur l’élytre gauche. La ligne parallèle à la suture des élytres varie aussi en longueur. Le point enfermé par la lunule peut être divisé en 2 points, ce qui est le cas chez notre spécimen (voir figure 3).
Afin de s’assurer de l’identification de l’espèce, il faut vérifier s’il y a des plantes du genre Cornus à l’endroit où nous l’avons trouvé. L’étude de Racine, en 2013, démontre qu’il y a présence de Cornus canadensis autour du lac Geai de la station de biologie des Laurentides.
BIOLOGIE
Les différentes espèces de calligraphes restreignent leur alimentation à quelques espèces de plantes (uniquement des dicotylédones). Calligrapha philadelphica est associé au genre Cornus, d’où son nom: calligraphe ligné du cornouiller. Le cornouiller est la plante hôte de cette espèce qui va donc passer la grande majorité de sa vie sur cette plante (alimentation, reproduction, développement des larves) (Robertson, 1966).
Dans l’Est du Canada, toutes les espèces de calligraphes semble avoir le même cycle de vie (voir figure 4). Les adultes hibernent et réapparaissent sur leur plante hôte dès le mois de Mai. La ponte débute vers la mi-Mai jusqu’au mois de juin. Les œufs sont jaune pâle, rose ou corail, déposés individuellement ou en amas, pouvant atteindre un total de 32 oeufs, sur les feuilles de la plante hôte (Robertson, 1966)(Brown, 1945). Les larves émergent et se nourrissent jusqu’à atteindre le dernier stade larvaire. Elles s’enfouissent ensuite dans le sol pour la pupation qui dure en moyenne 8 jours. Lorsque l’adulte émerge il est jaune pâle sans aucun motif sur ses élytres. Les couleurs apparaîtront peu à peu, devenant de plus en plus foncées et nettes avec le temps. Les premiers adultes de la nouvelle génération émergent de fin juillet jusqu’au mois de Septembre, ils chercheront ensuite un lieu pour l’hibernation. Une seule génération est produite par année (Brown, 1945).
Le cycle de vie du genre Calligrapha est très bien illustré dans cette vidéo.
Les populations de calligraphes sont souvent des colonies isolées, restreintes à la distribution de leur plante hôte. Les groupes peuvent être petits ou grand, et il peut éventuellement avoir des échanges (migration) entre les populations. Ainsi, il y a une grande variabilité entre les populations. Certaines espèces de Calligraphes ont même développé la parthénogenèse (C. philadelphica n’est pas concerné) (Brown, 1945).
DISTRIBUTION
La biogéographie du Calligraphe ligné du cornouiller, dans la zone Néarctique dont il est endémique, suit presque identiquement la distribution de sa plante hôte (Cornus). Il préfère les boisés et les lisières qui longent les forêts des régions tempérées où se trouve le Cornus. Les individus ne s’aventurent jamais très loin de leur plante hôte. Au Canada, ses habitats de prédilection se retrouvent surtout dans les provinces de l’Est, mais on les retrouve également jusqu’en Colombie Britannique (voir figure 5). Aux États-Unis, on observe la même tendance soit que le Calligraphe ligné du cornouiller se retrouve majoritairement dans les états de la côte Est (du Maine jusqu’à la Géorgie), mais aussi dans quelques états de l’ouest comme Washington, l’Idaho et le Montana (Gómez-Zurita, 2005).
RÉFÉRENCES
Arnett, R. H., Thomas, M. C., Skelley, P. E., & Frank, J. H. (Eds.). (2002). American Beetles, Volume II: Polyphaga: Scarabaeoidea through Curculionoidea (Vol. 2). CRC press.
Brown, W. J. (1945). Food-plants and distribution of the species of Calligrapha in Canada, with descriptions of new species (Coleoptera, Chrysomelidae). The Canadian Entomologist, 77(7), 117-133.
Gómez-Zurita, J., Vogler, A. P., & Funk, D. J. (2004). Diagnosing an overlooked North American taxon: Biological observations and mitochondrial insights on Calligrapha suturella Schaeffer, new status (Coleoptera, Chrysomelidae). Annals of the Entomological Society of America, 97(1), 28-36.
Gómez-Zurita, J. (2005). New Distribution Records and Biogeography of Calligrapha Species (Leaf Beetles), in North America (Coleoptera: Chrysomelidae, Chrysomelinae). The Canadian Field-Naturalist, 119(1), 88-100.
Jolivet, P., Petitpierre, E., Hsiao, T.H. (1988). Biology of Chrysomelidae (vol 42). Kluwer Academic Publishers.
Majka, Christopher. (s.d.) Electronic Resources on Coleoptera, Atlantic Canada Coleoptera, Calligrapha Chevrolat. Empty Mirrors Press.
Racine, G. (2013) Caractérisation de la tourbière du lac Geai Station de biologie des Laurentides. Dans le cadre du cours GEO3010.
Reid, C. A. M. (1995). A cladistic analysis of subfamilial relationships in the Chrysomelidae sensu lato (Chrysomeloidea). Biology, phylogeny and classification of Coleoptera: papers celebrating the 80th birthday of Roy A. Crowson, 2, 559-631.
Robertson, J. G. (1966). The chromosomes of bisexual and parthenogenetic species of Calligrapha (Coleoptera: Chrysomelidae) with notes on sex ratio, abundance and egg number. Canadian Journal of Genetics and Cytology, 8(4), 695-732.