Calopteryx maculata (Beauvois 1805)
Par Dalal ALMALAK et Charlène MORAND
Texte et photographies au domaine public CC0 1.0, sauf où précisé autrement
Spécimen capturé dans le chemin menant au lac Corriveau à la Station de biologie des Laurentides le 7 septembre 2017.
Classe: Insecta
Ordre: Odonata
Sous-ordre: Zygoptera
Famille: Calopterygidae
Genre: Calopteryx
Espèce: Calopteryx maculata (Beauvois, 1805)
Identification
Calopteryx maculata, de l’ordre Odonata, est une espèce du sous-ordre des zygoptères. En recherchant l’étymologie de ce nom, il est possible de trouver des racines grecque et latine. Calopteryx vient des mots grecs kalos et pteron, voulant respectivement dire belle et aile. Quant à maculata, ce terme tire son origine du mot latin macula signifiant « tache ». En effet, cela fait référence au ptérostigma blanc visible sur les femelles (BugGuide, 2014).
En premier lieu, ses yeux disproportionnés par rapport à la tête sont éloignés l’un de l’autre (University of Florida, 2015). En considérant également les petites antennes, ces diverses caractéristiques permettent de placer le spécimen au sein de l’ordre des odonates (voir figure 2). À première vue, il est possible de remarquer les ptérostigmas colorés en blanc placés en contraste sur chacune des deux paires d’ailes brunes (voir figure 4). Cette caractéristique permet d’identifier notre spécimen comme étant une femelle, puisque les mâles de cette espèce n’ont pas de ptérostigmas. De plus, l’abdomen de couleur noir du spécimen (voir figure 1) confirme le sexe de l’individu puisque le mâle arbore plutôt un abdomen bleu ou vert métallique (BugGuide, 2014).
Deuxièmement, il importe de statuer le sous-ordre auquel appartient ce spécimen. Cette partie de l’identification est simplifiée par la division dichotomique de l’ordre des odonates en deux sous-ordres: Zygoptera et Anisoptera. Malgré le fait d’avoir deux paires d’ailes de taille quasi identiques, zygoptera se différencie de son groupe frère par le point d’attache des ailes au thorax qui est plus étroit (voir figure 3). Par ailleurs, les yeux fortement décollés, tel que mentionné ci-haut, confirment l’appartenance du spécimen aux zygoptères.
Troisièmement, il faut identifier la famille à laquelle le spécimen appartient. La base des ailes constitue la caractéristique clé. En effet, celle de notre demoiselle n’est pas pétiolée (voir figure 3), c’est-à-dire que la base de l’aile n’est pas rétrécie. Cette observation témoigne de son appartenance à la famille des Calopterygidae, puisqu’il s’agit de la seule famille de demoiselles dont la base des ailes est non pétiolée (Beckemeyer et Huggins, 1998). Cependant, un facteur plus quantitatif renforce cette identification à cette famille. La technique consiste à compter le nombre de nervures transversales entre la base de l’aile et le nœud (University of Florida, 2015). Tout d’abord, le nœud est représenté par la partie supérieure de l’aile qui s’enfonce légèrement. La seule famille à avoir environ dix nervures transversales ou plus est celle des Calopterygidae. Cette situation s’applique à notre spécimen qui en a approximativement 23 (voir figure 4). De ce fait, les autres familles de zygoptères ne répondent plus aux critères d’identification. Ces dernières ne possèdent environ que deux de ces nervures transversales.
Finalement, il est important de noter que la demoiselle en question n’a pas de taches rouges à la base de ses ailes. Cela contribue à définir le genre, car cette caractéristique est propre au genre Hetaerina. Cette hypothèse écartée, la demoiselle ne peut donc qu’appartenir au genre Calopteryx. Pour définir l’espèce à laquelle elle fait partie, les ailes foncées allant du brun au noir est un indice majeur. Il faut noter que parmi toutes les espèces du genre Calopteryx, la seule à avoir cette particularité est Calopteryx maculata.
Basé sur toutes ces caractéristiques morphologiques et anatomiques, il est effectivement possible de conclure que ce spécimen appartient à l’espèce C. maculata. Le caractère le plus marquant est le nombre de nervures transversales entre la base de l’aile et le nœud qui permet d’identifier à la famille Calopterygidae. Aussi, les ailes brunes sont assez uniques parmi le genre Calopteryx. De plus, l’identification à l’espèce pour l’ordre des odonates se fait majoritairement grâce aux caractéristiques clés se retrouvant sur les ailes.
Répartition géographique/ Habitat
La demoiselle bistrée (Dubuc, 2007, p. 43), comme elle est communément appelée, peut mesurer de 39 à 57 mm. Elle se trouve principalement dans les régions néarctiques, plus spécifiquement dans le Sud du Manitoba, du Sud jusqu’à l’Est du Texas, de l’Est jusqu’à la Nouvelle-Écosse et la Floride (Evans, 2007, p.69). Pour ce qui est de son habitat, celle-ci se retrouve perchée sur des branches situées aux alentours de ruisseaux ou de rivières lors des journées ensoleillées. En cas de journée plus froide, elles peuvent être présentes dans les forêts entourant les cours d’eau, comme le témoigne le spécimen. La larve, contrairement à l’adulte, est complètement aquatique. Cette dernière se niche près des plantes aquatiques. Il s’agit d’une espèce qui est principalement présente durant la période de mai jusqu’à juillet, voire août (BugGuide, 2014).
Cycle de vie
Étant une espèce diurne, C. maculata s’accouple habituellement en début d’après-midi. Lors de la reproduction, les mâles se livrent à une féroce compétition pour l’accès aux femelles. Ceux-ci adoptent un comportement territorial pour offrir aux femelles le meilleur lieu de fécondation suite à l’accouplement. Tout d’abord, le mâle a un organe de reproduction secondaire situé en dessous de son thorax. Avant l’accouplement, il transfère sa semence de son ouverture génitale à cet organe. De plus, il est possible de confirmer que notre spécimen est effectivement une femelle par l’absence des ces pinces anales au bout de son abdomen (voir figure 5). Pour attirer la femelle, le mâle se positionne en croix, les ailes postérieures en angle droit avec le corps. Cette technique permet de relever l’abdomen pour attraper celle-ci par son cou. Grâce à ses pinces anales, le mâle peut ainsi maintenir la femelle en place. La femelle, quant à elle, ramène son abdomen vers l’avant pour joindre le bout à l’organe reproducteur secondaire du mâle. Cette position forme ainsi une structure semblable à une roue (voir figure 6) (Evans, 2007, p.60-61).
Aussitôt fécondée, la mère se dépêche de pondre. Les œufs de Calopteryx maculata se retrouvent soit flottants dans l’eau, émergés ou submergés par de la végétation. La dernière option est favorisée par ces demoiselles, puisqu’il s’agit d’un milieu optimal pour protéger les progénitures. Par ailleurs, le mâle vole à proximité pour tenir la garde contre d’éventuels prédateurs. Lorsqu’un mâle s’accouple avec plusieurs femelles, un agrégat d’œufs se forme en un même lieu, car celui-ci doit leur offrir une protection. Enfin, la larve, nommée naïade, sort de sa coquille 10 à 120 minutes plus tard (NatureServe Explorer, 2016).
Cette espèce témoigne du même cycle de vie que tous les autres odonates, c’est-à-dire d’un développement hémimétabole, définit par la métamorphose incomplète. Alors que les larves se dédient à la croissance, les adultes se reproduisent. La durée de ce cycle de vie est d’environ un à deux ans, dont la majorité a lieu lors du stade larvaire. Fait intéressant, les demoiselles respirent par l’anus. En effet, Evans (2007, p.60-61) explique que les larves ont trois feuillets de branchies situés sur le bout de l’abdomen qui permettent leur respiration. Afin d’augmenter leur taille, les demoiselles en devenir font la mue de dix à douze fois, où elles acquièrent une pigmentation plus foncée. À la dernière métamorphose, l’adulte juvénile émerge et rejoint la terre ferme. On lui accorde le terme « adulte juvénile », puisque sortant de l’eau, il n’a pas encore atteint sa maturité sexuelle (Evans, 2007, p.60-61). À cette étape, le nouvel individu finit de durcir ses ailes et son abdomen avant de pouvoir s’envoler. Par la suite, la demoiselle adulte vit de quelques semaines à quelques mois le temps de se reproduire (North American Insects & Spiders).
C. maculata est une espèce totalement carnivore et prédatrice. En effet, elle se nourrit de petits insectes, tant au stade larvaire qu’au stade adulte (BugGuide, 2014). Cependant, elle ne se trouve pas à la tête de la chaîne alimentaire. Comme la presqu’entièreté des insectes, elle est la proie des autres animaux. Certains facteurs influencent la durée de vie de l’adulte. Comme l’indique Stoks & Cordoba-Aguilar (2012), le risque de mortalité croît en présence de parasites, de prédateurs, de mauvaises conditions environnementales et du manque de nourriture. Aussi, le harcèlement des mâles pour s’accoupler est un facteur dangereux pour les femelles.
Bibliographie
Beckemeyer, RJ., Huggins, DG (1998). The Kansas School Naturalist, Emporia State University, vol. 44
BugGuide, (14 juin 2014). [En ligne] https://bugguide.net/node/view/601 (Consulté le 22 octobre 2017)
Bybee, Seth. Dragonflies and Damselflies. University of Florida. (Avril 2015). [En ligne]. http://entnemdept.ufl.edu/creatures/misc/odonata/odonata.htm (Consulté le 22 octobre 2017)
Dubuc, Yves (2007). Les insectes du Québec. Ottawa: Broquet Inc. p. 456
Evans, AV (2007). Field Guide to Insects and Spiders of North America. New York: Sterling Publishing Co. p. 498
North American Insects & Spiders. [En ligne]. http://www.cirrusimage.com/damselfly_Ebony_Jewelwing.htm (Consulté le 30 octobre 2017)
NatureServe Explorer (Novembre 2016). [En ligne]. http://explorer.natureserve.org/servlet/NatureServe?searchName=Calopteryx+maculata (Consulté le 24 octobre 2017)
Stoks, R. & Cordoba-Aguilar, A. (2012). Odonata: A Complex Life, Annual Review of Entomology, vol. 57