Sphaerophoria philanthus (Meigen 1822)

Sphaerophoria philanthus (Meigen 1822)

Par Diane BUREAU et Julien SAAVEDRA-LAVOIE, 2014

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Mâle Sphaerophoria philanthus

Ordre: Diptera

Sous-ordre: Brachycera

Super-Famille: Syrphidea

Famille: Syrphidae

Sous-famille: Syrphinae

Tribu: Syrphini

Genre: Sphaerophoria

Espèce: philanthus

Famille des Syrphidae :

Les espèces de la familles des Syrphidés, aussi connues sous le nom de syrphe, font parties des diptères les plus colorés et les plus fréquemment capturés. Ils se retrouvent sur tous les continents à l’exception de l’Antarctique. Grâce à la grande diversité des niches pouvant être occupées par leurs larves, ils sont présents dans la majorité des types d’habitats, de la forêt tropicale jusqu’aux déserts arides ou arctiques. Étant donné le vaste territoire qu’ils couvrent, ces espèces sont sujettes à une importante pression de la part des prédateurs. C’est pourquoi toutes les espèces de ce groupe montrent une ressemblance générale, et parfois même une ressemblance spécifique très proche avec les abeilles et guêpes (Vockeroth, 1992).

Importance de la famille au niveau économique

Au stade larvaire, la majorité des espèces de syrphidés sont prédatrices d’une grande variété d’espèces appartenant à la super famille des pucerons (Aphidoidea) dont plusieurs espèces sont des ravageurs de cultures. Les syrphidés sont donc d’importants contrôleurs biologiques contre ces insectes (Vokeroth 1992).

Au stade adulte, ils se nourrissent principalement de pollen et de nectar, et représentent donc des pollinisateurs importants pour plusieurs espèces de plantes. En effet ceux-ci transportent le pollen sur leur thorax quand ils butinent aux fleurs (Yariv & Amots, 1976).

Genre Sphaerophoria

Le genre Sphaerophoria regroupe des espèces de mouches de taille petite à médium, ayant des marques jaunes sur la tête, le thorax ainsi que l’abdomen (à noter que certaines espèces sont totalement noires) et leurs corps est plus long que leurs ailes (Wallisroughley, 2014). Il y a 13 espèces connues du genre en Amérique du Nord, distribuées largement au Canada et aux États-Unis.

Espèce Sphaerophoria philanthus

Description

L’espèce mesure environ 10 mm, a un long abdomen à bandes noires et jaunes, le thorax est brun avec une strie brune. L’espèce a des yeux de grande dimension de couleur brune et un visage couleur jaune clair. Les pattes sont jaunes et les ailes transparentes qui comme toutes les espèce de la famille des Syrphidae ont une fausse nervure médiane, la veina spuria. Les femelles se distinguent des mâles par un abdomen se terminant avec un bout plus pointu ainsi des yeux largement séparés sur le front (versus contigus sur le front chez les mâles) (naturesearch 2014).

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L’aile présentant la fausse nervure médiane
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Les yeux contigus du mâle

 

 

 

 

 

 

 

Clef de l’espèce

Article apical du tarse des pattes antérieure et médiane brun pâle ou noir et nettement plus foncé que I ‘article basilaire, ou tous les articles de couleur noire. Lobe ventral du surstylus garni d’un appendice pré-apical aplati sur le bord dorsal ; lobe interne du surstylus, pointu dans sa portion apicale (Vokeroth 1992).

Cycle de vie

Sphaerophoria philanthus est une espèce répandue de la famille des Syrphidae à la métamorphose complete, dite holométabole. Quatre stades de métamorphoses caractérisent son cycle de vie : œuf, larve, pupe et adulte (Marshall, 2012).

Stade 1 : Œuf

Les œufs fécondés sont pondus par la femelle à l’aide de la partie terminale télescopique de son abdomen mou et flexible car elle ne possède pas d’appendice ovipositeur (Marshall, 2012 p.16). Les œufs sont déposés sur une plante, près du sol, dès le printemps, tout près ou parmi de leur future source de nourriture, des colonies de pucerons (Coderre, 1987). Ils éclosent rapidement, habituellement en 2 jours (Vockeroth, 1992),  une stratégie utilisée lorsque l’habitat est éphémère (Marshall, 2012 p.17)

Stade 2 : Larve

C’est le stade principal d’alimentation. Il correspond à la plus grande partie du cycle de vie de l’insecte. Trois mues larvaires successives et trois instars permettront aux larves de se déplacer, de s’alimenter, de croître et poursuivre leur développement (Marshall, 2012 p.17). Ses larves sont des prédateurs voraces, aphidiphages non spécifiques. Elles se nourrissent de pucerons, hémiptères à cuticule molle, parasites de plantes. Une larve de 3 à 4 jours peut dévorer jusqu’à 300 pucerons par nuit (Agriculture and Agri-Food Canada 2014). Elles les immobilisent à l’aide de sécrétions salivaires collantes et transpercent et aspirent avec leurs pièces buccales verticales en crochet. Elles sont molles, sans capsule céphalique, aveugles, et n’ont pas d’appendice de locomotion. Elles sont colorées jaunes ou vertes grâce à des dépôts de pigments de sang ou de gras sous leur peau translucide. Cette coloration leur permet de se camoufler parmi leur habitat de feuilles et tiges des plantes (Marshall, 2012 p 308).

Stade 3 : Nymphe

Cette étape intermédiaire, permet une première mue de métamorphose (Scott, 2004). Elle est caractérisée par le durcissement de la cuticule du 3e instar larvaire et sa transformation en un cocon, le puparium. La nymphe ne se nourrit pas, son énergie provient des réserves accumulées durant le stade larvaires (Scott, 2004).

Cette transition permettra l’apparition externe des ailes et autres appendices non fonctionnels qui étaient internes chez la larve sous forme de disques imaginaux et la formation de structures de l’adulte  (Marshall, 2012 p24). Les variations de températures saisonnières et géographiques durant cette étape, influencent sa coloration. Sphaerophoria philanthus est plus foncé dans les régions plus au sud du Canada (Vockeroth, 1992).

Stade 4 : Adulte

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Adulte S. philanthus

Une 2e mue de métamorphose, dite imaginale, permet à l’insecte de compléter son cycle de développement. Des adaptations spécifiques lui permette d’émerger du puparium constitué à cette étape de  3 cuticules soient la cuticule larvaire durcie, celle fine de la nympher, et la cuticule pré-exuviale de l’adulte. À l’aide du ptilinum, une structure gonflable situé sur sa tête et une ligne circulaire plus faible à la partie terminale de son abri il réussit donc  à émerger (Marshall, 2012 p.295). Cette nouvelle mouche à fleur pourra s’envoler avec ses deux ailes fonctionnelles, se nourrir non plus de pucerons mais de nectar et de pollen. Les stratégies reproductives peu connues permettront la rencontre d’une femelle et d’un mâle aboutissant à la fécondation des œufs et au recommencement d’un nouveau cycle.

Répartition géographique

La famille des Syrphidae ou mouches à fleurs est très rependue au Canada et aux États-Unis avec ses 870 espèces identifiées. Le genre Sphaerophoria compte 13 espèces en Amérique du Nord (NatureSearch 2014). On les retrouvent en densité élevée dans des secteurs riches en fleurs indigènes avec de larges inflorescences et de petites corolles aplaties structures végétales adaptées à leur morphologie et leur choix alimentaire pour le pollen et le nectar. Dans ces environnements elles ont un rôle essentiel de polinisateur.

On les retrouvent aussi en marges des forêts et des champs cultivées où leurs larves prédatrices aphidiphages trouvent leur source alimentation essentielle et jouent un rôle important dans la lutte biologique contre des parasites de plantes (Sutherland et al 2001) (Martinez et al 2013).

Ecologie

Prédation par les larves

Les larves de Sphaerophoria philanthus se nourrissent d’espèce de la famille Aphidoidea et démontrent l’importance au niveau de la stratégie de différentiation des niches entre les différents prédateurs du groupe. Au niveau de la localisation sur les feuilles d’espèces végétales consommées par les Aphidoidea, l’adulte pond en dessous et seulement sur celles situées à proximité du sol. Au niveau temporel, la ponte à lieu en début de saison (à la mi-juillet) au travers des colonies importantes, notamment de pucerons (Coderre et al. 1987). Bien que les femelles utilisent leur sens visuel pour trouver les lieux convenable pour la ponte, ce serait leur sens de l’odorat qui est le plus important afin de localiser les feuilles occupées par des aphides (Yariv & Amots 1976). Les autres prédateurs ciblent plutôt les feuilles situées plus haut sur la plante et ne s’alimentent pas à la même période de la saison (Coderre et al. 1987).

Mimétisme:

Comme beaucoup d’espèce de la famille des Syrphidae, S. philanthus utilise la stratégie du mimétisme batésien. Elle prend pour modèle la guêpe en ayant une apparence visuelle très ressemblante. Ajoutons qu’elle démontre un comportement semblable, par exemple lorsqu’elle est saisie, elle pousse le bout de l’abdomen vers ce qui la tient, bien qu’elle ne soit pas équipée d’un dard. Un autre exemple est le son émit par la mouche qui rappelle celui des hyménoptères piqueurs (Penney et al 2013).

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Sphaerophoria philanthus

 

 

 

 

 

 

 

Références

Agriculture and Agri-Food Canada [En ligne], http://www.agr.gc.ca/eng/science-and-innovation/science-publications-and-resources/good-bug-bad-bug-agricultural-science-at-work-for-farmers/?id=1285101410251#a3, (page consultée le 22 octobre 2014)

Coderre, D., and Provencher, L., and Tourneur, J. C. 1987. Oviposition and niche partitioning in aphidophagous insects on maize. Département des Sciences Biologiques, Université du Québec à Montréal, p. 198, 202.

http://journals.cambridge.org/download.php?file=%2FTCE%2FTCE119_02%2FS0008347X00045697a.pdf&code=43bc08703e2428cbcc1b3917051f9ad5

Encyclopedia of life: classification [En ligne],http://eol.org/pages/750734/overview, (page consultée le 18 octobre 2014)

Marshall, S. 2012 Flies: the natural history and diversity of dipteral. Firefly books Ltd,616 pages, p.15-16-17-22-24-395-308-309.

Nature Search [En ligne]    http://www.fnanaturesearch.org/index.php?option=com_naturesearch&task=view&id=1882, (page consultée le 17 octobre 2014)

Penney, H. D., and Hassal, C., and Skevington, J. H., and Lamborn, B., and Sherratt, T. N. 2013. The Relationship between Morphological and Behavoral Mimicry in Hover Flies (Diptera: Syrphidae), The American Naturalist, Vol. 183, No. 2, p.281-288. http://www.canacoll.org/Diptera/Staff/Skevington/pdfs/Penney_mimicry_American_Naturalist_2014.pdf

Scott F. G. 2004, Biologie du développement, De Boeck Supérieur, 858 pages, p.252

Système canadien d’information sur la biodiversité [En ligne],    http://www.scib.gc.ca/acp/fra/siti/regarder?tsn=140261, (page consultée le 18 octobre 2014)

Vockeroth, J. R. 1992. The insects and arachnids of Canada part 18: The flower flies of the subfamily Syrphinae of Canada, Alaska, and Greenland : Diptera, Syrphidae, Agriculture Canada, 456 p., p.11.http://www.esc-sec.ca/aafcmonographs/insects_and_arachnids_part_18.pdf

Wallisroughley, [En ligne] http://www.wallisroughley.ca/Sph.html, (page consultée le 20 octobre 2014)

Yariv, I., and Amots, D. 1976. The pollination ecology of Epipactis consimilis don (Orchidaceae) in Israel, New Phytol, 79, 173-177, p.175-176. http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1469-8137.1977.tb02193.x/pdf